
C'est une réussite. Le symposium de l'UPF des 30 et 31 mars sur "Médias, environnement et développement durable" a été en tous points un incontestable succès.
Non seulement par son contenu —ce qui est évidemment primordial— mais aussi grâce à un environnement exceptionnel et un accueil remarquable à l'Université Mohamed VI Polytechnique de Benguerir.
D'abord le contenu : tables rondes et ateliers ont tenu leurs promesses et des débats fructueux ont pu s'organiser. Le temps était compté et nous aurions eu besoin de prolongations pour permettre que tout le monde s'exprime. Difficile de résumer les constats et les exigences qui ont marqué les discussions. Unanimité pourtant sur une demande récurrente : le besoin d'en savoir plus pour mieux jouer le rôle d'information qui est celui des médias sur ces grandes questions du développement durable. Pas facile parfois de traiter simplement des questions souvent complexes. Si Maria Snoussi, Présidente du conseil scientifique de l'IRD, a réussi la prouesse de la vulgarisation, le besoin de formation a été exprimé souvent, et singulièrement au cours des débats des ateliers. L'un d'eux a même été jusqu'à formuler une "revendication" pressante : que l'UPF renouvelle ces rencontres, et qu'elle mette en place des formations adaptées pour toujours mieux traiter les questions d'environnement.
Oui, nous avons été reçus dans les meilleures conditions. Oui, la gentillesse et le professionnalisme ont été la marque permanente de nos hôtes. Et ce climat de sérénité n'a pas été pour rien dans la qualité de nos échanges. Notre section marocaine a mis les petits plats dans les grands, Khadija Ridouane, secrétaire générale adjointe, n'a pas ménagé sa peine... Chaque intervenant(e), chaque participant(e) s'est investi(e) sans compter, permettant d'approfondir par l'excellence des conditions d'accueil les grandes questions en débat. Prendre position sur les questions environnementales ? S'engager ? Comment aborder les problèmes de gouvernance, les promesses et les engagements non tenus ? N'y a t-il pas au fond des questions de fond liées aux libertés de la presse ? Quelles pressions des Etats et des entreprises sur les médias lorsque sont dénoncés des excès ou des contraventions aux lois ? Quelles pressions sur les médias lorsque les budgets publicitaires sont menacés ? Quels moyens mis en œuvre par les médias pour couvrir les questions liées au développement durable ?
"Je ne sais pas combien de journalistes ont été envoyés à la COP 22, mais on en a envoyé des dizaines pour des matchs de foot"... a résumé sur cette question Mamoudou Ibra Kane, directeur général du groupe Futurs Médias (Sénégal). "La responsabilité sociale des entreprises dans l'environnement, c'est aussi une question de rapport de forces", a renchérit Khalil Hachimi Idrissi, Directeur Général de Maghreb Arab Press.
Un excellent résumé des débats a été publié dans le quotidien marocain "L'Economiste" du 3 avril sous la plume de Nadia Salah : "...Chez nous, la culture technique est moins développée, moins répandue. Elle reste très, trop souvent une affaire d'experts. Ce qui impose donc aux médias un effort important : propager, bien sûr, mais aussi vulgariser, démocratiser... et protéger.
En effet, l'information, et sa petite sœur la formation, sont des cibles pour des formes spécifiques de pollution. Le "Green Washing", le "rhabillage en vert" est une pratique fréquente chez les grands pollueurs, qui y mettent des moyens colossaux, pour influencer les élus et les gouvernements ou pour faire —ou faire faire— la guerre à un concurrent.
Le "green washing" n'a pas encore intoxiqué le continent, pour une bonne et mauvaise raison à la fois : les voix citoyennes ont du mal à peser car leur force d'influence politique ou commerciale reste limitée. Il n'y a que les médias pour leur donner du poids. Et les réseaux de médias pour se protéger les uns les autres".
Jean Kouchner
Secrétaire général international